Russie Occident, l’autre guerre de 100 ans (troisième partie)

Dans la seconde partie nous décrivions les phases de la guerre de 100 ans russo-occidentale, et montrions comment elles s’enchainent pour  mener l’occident à « l’âge de la déraison » dans lequel il se débat aujourd’hui. Nous re-définissions ensuite le conflit entre les USA et la Russie, comme celui opposant les pays producteurs de biens et ceux qui les consomment, et en tirions les conséquences, en particulier en termes d’affaiblissement de l’occident.

Vu de Russie : achever la victoire de 1945 et gagner la guerre de 100 ans

En ce qui concerne la Russie, le conflit est existentiel au sens classique du terme. Perdre peut signifier la disparition du pays, de la même façon que l’URSS a cessé d’exister. Il est vraisemblable que l’état Russe est entré dans cette guerre sans avoir pleinement conscience de ce fait. Les buts de guerre avoués étaient la dénazification, et la neutralisation de l’Ukraine. Cela parait un peu obscur, qu’il me soit permis de les reformuler sous un éclairage historique : il s’agissait simplement de reprendre un peu du considérable terrain géopolitique perdu sous la pression permanente des USA, depuis les accords de Yalta. Ce conflit était en germe dés la première extension de l’OTAN. Je pense que les Russes étaient convaincus, en février 2022, que l’intervention armée amènerait rapidement toutes les parties à la table des négociations pour des discussions, cette fois, sincères. Ils avaient sous-estimé l’importance, aux yeux de la clique des néoconservateurs, du projet de destruction de l’état Russe, la détermination à y sacrifier tous les alliés européens, et la soumission veule des dits alliés aux pressions états-uniennes. Ainsi, ce sont les européens eux-mêmes, qui sont intervenus pour saboter les deux premières tentatives de négociations. Lors de la seconde, Boris Johnson s’est déplacé lui-même à Kiev pour interdire à Zelensky de négocier. Donc, par le geste et la parole, Boris Johnson a convaincu la Russie que l’occident était son véritable ennemi, et qu’aucune négociation ne serait possible. Et rappelons qu’Angela Merkel, mais aussi François Hollande, ont enfoncé le clou en déclarant publiquement que les accords de Minsk n’étaient qu’une manœuvre dilatoire pour se donner le temps de transformer l’Ukraine en tête de pont de l’OTAN. On révèle ainsi à l’opinion publique Russe que : 1) l’hostilité présente de l’Europe n’est pas née de la décision du recours aux armes du 24 février, mais formait déjà l’axe directeur de toute la politique occidentale, 2) tout accord diplomatique avec nous est absolument impossible. La conséquence logique : toute la stratégie russe doit consister à écoeurer l’Occident de son projet hostile, ou plus simplement dit, qu’il lui foute la paix une bonne fois pour toute. Au risque de choquer, je vais exprimer les choses ainsi : la victoire de 1945 est, pour l’URSS/Russie une victoire à la Pyrrhus. Elle l’a laissée exsangue, ce dont l’occident a aussitôt outrageusement profité. Fait unique dans l’histoire, les Etats-Unis ont établi leur empire sur la base d’une victoire qui avait surtout été payée du sang d’un allié, la Russie. Puis, ils ont utilisé la force qui en résultait pour tenter de réduire cet ex-allié. Et, il faut le reconnaître, ils ont été bien proche de réussir dans les années 90.

Ainsi, le conflit qui a éclaté le 24 février, est un conflit global, militaire, diplomatique et économique qui a pour enjeu la fin de la guerre de 100 ans que l’occident mène contre la Russie, donc la révision des conditions de la sortie du second conflit mondial. C’est une lutte « à mort », où la Russie joue sa survie. Une défaite signifierait la disparition de l’état, et le morcellement du pays en états colonisés, ainsi qu’un appauvrissement draconien de la population, toutes les ressources étants détournées, au profit des plus importants intérêts financiers occidentaux. A terme, c’est la culture russe qui disparaîtrait.

Quelle stratégie pour la Russie : Bzrezinski traduit en Russe !

Alors, quelle est la stratégie qui permettrait à la Russie d’atteindre son but : mettre un point final à 100 ans de visées occidentales sur son territoire et ses ressources ? Levons-nous, faisons le tour de la table, et regardons la carte qui y est disposée, du point de vue de Moscou. Le brillant raisonnement de Brzezinski, la Russie sans l’Ukraine n’est plus qu’une puissance régionale, peut être retourné. Que sont les USA sans leurs sujets Européens ? Réponse : sans l’Europe, les USA ne sont plus qu’une puissance parmi d’autres. Je suis convaincu que c’est un concept qui aujourd’hui agite les stratèges en Russie. Une victoire totale de la Russie passerait par la destruction du système impérial que les USA ont mis en place en 1945, et que, ironiquement, les Russes ont payé de leur sang. Et cela passerait par la destruction de l’Europe, non pas physique, mais diplomatique et économique. Mais rappelons-le, la guerre économique est une vraie guerre, et les deux guerres mondiales se sont jouées aussi, et en grande partie sur ce terrain. C’est bien parce que les USA étaient les vainqueurs économiques de la deuxième guerre mondiale, qu’ils ont pu « annuler » les effets de la victoire militaire de la Russie. Rappelons également qu’il ne se passe plus de semaine sans que nous déclarions notre engagement indéfectible à la victoire de l’Ukraine, que nous ne vidions nos entrepôts pour envoyer des armes qui ne peuvent rien changer sur le terrain. Et comme les choses semblent de plus en plus « compliquées » sur le champ de bataille, voilà que nous promettons d’armer et soutenir une guérilla pour engager la Russie dans un nouvel Afghanistan. Cette dernière ânerie prouve aux Russes, s’il en était encore besoin, que leur victoire militaire, qui s’annonce, sera insuffisante pour terminer le conflit. Ce qu’il faut obtenir, c’est la destruction du NATOstan. Et souvenons-nous, à nouveau, que la déclaration de guerre économique est bien venu de nous, l’Occident, et à une époque où la Russie cherchait sincèrement à approfondir ses liens avec l’Europe, et même à intégrer certaines de ses institutions. C’est nous qui nous sommes positionnés en ennemi les premiers. En conséquence, si la Russie doit nous infliger des souffrances pour atteindre ses buts géopolitiques, elle le fera avec le sentiment d’être dans son bon droit, et, il est important de le noter, avec l’assentiment de la population.

La Russie ne communique pas, on est donc contraint d’analyser les faits dont nous avons connaissance de manière incontestable pour tenter déterminer une partie de la pensée stratégique Russe. Il est clair que les premiers mois du conflit ont été mené dans l’hypothèse que tout le monde viendrait rapidement à la table des négociations, pour construire le nouveau système de sécurité européen que la Russie appelait de ses voeux depuis des années. Je ne crois pas à l’hypothèse de l’espoir d’un écroulement de l’état Ukrainien, car dans ce cas, il aurait fallu plus de troupes pour assurer la sécurité pendant la transition vers un état qui aurait été un vassal de la Russie. Les faibles effectifs engagés le 24 février 2022 suggèrent bien plus que le but était d’amener les USA et l’UE à négocier. Pour qu’un accord est des chances raisonnables d’être mis en oeuvre après sa signature, il aurait fallu un pouvoir ukrainien raisonnablement légitime pour que la population l’accepte. Espérer qu’un état installé par une puissance étrangère puisse jouer ce rôle est absurde. Pour la Russie, cela aurait été renouveler l’erreur du coup d’état de 2014, qui a bien vu tout une partie de la population se soulever contre le nouveau pouvoir installé par les USA. Après que les tentatives de négociation aient été sabotées par les pays européens, en particulier le Royaume Uni, l’état-major russe a ordonné un retour sur une ligne de front plus courte, et qu’il a fait fortifier. On en déduit logiquement qu’il s’est préparé à une guerre d’attrition. Cela s’accompagne, de manière remarquable, de grande manoeuvres diplomatiques, et d’un redéploiement des marchés de l’énergie vers l’Asie. Le signal que la Russie envoie est que ce qui se passe sur le terrain de combat, est somme toute secondaire ; que le vrai front est celui de la diplomatie et de l’économie : accueil de nouveaux pays dans les BRICS, remplacement du dollar par le Yuan pour certaines transactions (en nombre grandissant), etc.

A peine quelques semaines après le début du conflit, un ami rentrant du Donbass me disait que les combats y seraient longs, car les fortifications bâties par l’armée ukrainienne pendant 8 ans seraient très difficiles à réduire. Ce fait était connu des militaires du Donbass depuis longtemps. On a donc du mal à imaginer que l’état-major russe l’ait ignoré, et ait donc pu espérer une marche victorieuse de type blitzkrieg sur Kiev, pour s’y installer durablement. De même, durant ces années, la Russie a construit un outil militaire d’une taille adaptée à ses moyens et ses ambitions, sans se lancer dans une course aux armements épuisantes. Au contraire, elle a investi dans les armes hypersoniques, rendant toute attaque nucléaire préemptive suicidaire, mais rendant aussi impossible un soutien logistique des USA vers l’Europe en cas de guerre ouverte. Il y a donc bien eu une réflexion stratégique multi-vectorielle durant les 8 ans qui séparent les hostilités du coup d’état de 2014. On peut donc supposer que la stratégie diplomatique déployée en ce moment a été tout aussi pensée, et s’articule avec la stratégie strictement militaire. Cela ne veut pas dire qu’il n’y ait pas eu d’erreurs, et la sous-estimation de l’enthousiasme européen à s’autodétruire est sûrement la principale. Mais je ne pense pas qu’une sous-estimation grossière de la résistance des fortifications ukrainiennes, et de la réalité du terrain dans son ensemble, en fasse partie.

Au contraire, je pense que la résilience ukrainienne a été assez bien estimée, précisément parce que la proximité culturelle entre les deux pays leurs permet de se jauger mutuellement assez précisément. Les Ukrainiens résistent comme les Russes, et vice versa. La stratégie russe consiste donc à frapper au point faible, c’est à dire l’UE. Elle le fait en nous aidant à nous enfermer dans une « chaudron diplomatique ». Et elle joue sur du velours. Nos guerres néo-coloniales des vingt dernières années, ainsi que notre diplomatie du « wokisme » nous rendent odieux aux yeux de la majorité de la population mondiale. Notre soumission aux USA nous rend méprisables. Nous perdons ainsi à grande vitesse notre influence sur le cours de l’histoire mondiale, au profit de la Russie et surtout de l’Asie en générale. Les actions et les transformations des sociétés occidentales européennes au cours des vingt dernières années, ont démontré au monde que nos valeurs étaient essentiellement des jingles servant à justifier des politiques de prédation, et génératrices d’inégalités sociales insupportables. Enfin, notre auto-proclamation comme empire du bien, nous être lancés dans une croisade internationale pour les droits des minorités sexuelles, vient saper toute l’efficacité de notre soft-power. De la part de la Russie, il serait idiot de ne pas en profiter.

Est-ce efficace ? Pour le moment, il semble bien que oui. Nos économies s’épuisent, les pays non occidentaux tentent de se dégager du système financier centré sur les Etats-Unis. Le monde multipolaire émerge. La Russie et la Chine se rapproche de plus en plus, unissant une base industrielle puissante à toutes les ressources nécessaires pour l’alimenter. La Russie partage avec la Chine son avance en matière de technologie militaire. Pendant ce temps, en Europe, les populations manifestent, et la presse se gargarise, l’Ukraine doit gagner, l’Ukraine gagne, et de temps en temps on lui envoie quatre chars, ou quelques missiles, de quoi tenir une journée. Quant aux morts ukrainiens, qui devraient quand même être notre première préoccupation, c’est à peine s’ils existent dans les médias. Et on ne peut même pas surestimer le talent russe, car une grande partie de l’efficacité de la Russie provient de nos propres erreurs, en particulier les politiques énergétiques erratiques des vingt dernières années, ainsi que celles des délocalisations industrielles massives.

La stratégie des USA : le plan B

La stratégie initiale des USA était de provoquer la dislocation de la Russie par le jeu de sanctions économiques d’une intensité jamais atteinte. A l’évidence, c’est un échec. Et de cet échec en vient un autre, bien plus grave : la perte de confiance dans le système financier centré autour du dollar. Comme dit plus haut, placé dans une position impériale, les USA ont besoin des flux financiers provenant du reste du monde. La saisie des avoirs de l’état Russe, sans l’écroulement de son économie, signe la fin, à plus ou moins longue échéance, du système dollar. Donc la raison commanderait d’en prendre acte, et de « réduire la voilure ». Loin de là, les Etats-Unis viennent d’annoncer une augmentation pharaonique de leur budget militaire pour les années à venir. D’où viendra l’argent ? Depuis l’explosion de NorthStream la réponse va de soi : du pillage sans retenu de l’Europe. Je fais l’hypothèse que les Etats-Unis ont déjà pris acte de la défaite : la Russie ne sombrera pas. On ne pourra pas se ré-approprier ses ressources comme dans les années 90. Et la Chine n’est plus seulement l’atelier du monde. C’est devenu la première puissance économique mondiale, avec des ambitions géopolitiques (à ne pas confondre avec une posture impérialiste, cependant). Mais l’Europe reste encore suffisamment riche. Les USA vont donc accepter la multipolarité, et se concentrer sur l’empire « noyau », celui qu’ils ont acquis à la fin de la seconde guerre mondiale, formé de l’Europe, le Japon, et de l’anglosphère (Australie, Canada, Nouvelle Zélande, etc). Pour l’Europe, c’est une très mauvaise nouvelle. Car les USA ne sont plus la puissance victorieuse de 1945, pays incomparablement le plus riche de la planète, responsable de 50% de la production industrielle mondiale, et partant non seulement généreuse, mais ayant les moyens de sa générosité. C’est au contraire une puissance assez humiliée, ayant subi défaites militaires sur défaites militaires pendant 20 ans, appauvrie, déchirée par des conflits internes d’une grande gravité, et qui est donc vindicative et prédatrice. La manière dont ils profitent de la dépendance énergétique qu’ils ont eux-mêmes créée en est le signe le plus clair, et ce n’est qu’un début. On peut hélas parier que d’ici dix ans, Mercedes, BMW, Airbus, Ariane, etc., seront des entreprises américaines.

La Russie étant toujours debout, et les économistes prévoyant même une solide croissance pour 2023 et 2024, l’idée que l’Ukraine reprenne et le Donbass et la Crimée étant absurde, les USA et l’Europe vont bien devoir faire face à ce qui est un échec, voir une défaite. Pour les Etats-Unis, cela n’a rien d’effrayant. Voilà des années qu’ils connaissent des défaites retentissantes, accompagnées d’images humiliantes de personnel diplomatique s’enfuyant en hélicoptère depuis le toit de leurs ambassades. La dernière s’est produite en Afghanistan, à la suite de quoi ils se sont attaqués à la Russie ! Il semble que le pays est acquis une capacité d’indifférence à ces défaites sur les théâtres extérieurs. Ils laissent tomber leurs alliés d’hier et passent à autre chose. Si vraiment la blessure d’amour propre gratouille trop fort, on fait quelques films pour la cicatriser. Il en sera de même avec l’Ukraine, et d’ailleurs, les premiers frémissements dans la presse d’un changement d’attitude apparaissent. Pour les USA, la défaite militaire ne pose pas de problèmes particuliers. Ce sont les conséquences du conflit sur l’ordre économique mondial qui sont-elles très sérieuses, mais à nouveau, le plan B est déjà en course d’exécution. Pourtant, comment la société états-unienne, ultra polarisée, supportera les conséquences croissantes du conflit contre la Russie et la Chine, appelé à prendre de l’ampleur ? Il est difficile de le dire. Mais s’il se produit un événement grave, comme une dislocation de l’état fédéral, sur le mode de feu l’URSS, le conflit ne sera qu’un élément déclencheur, les raisons profondes étant, comme pour l’URSS, les contradictions internes devenues trop insupportables.

Pour l’Europe le risque est très différent.

L’Europe encerclée

Observant l’Europe dans ce conflit, on se dit que tous les fusibles de la raison ont fondu. Car même si on se place du point de vue de l’oligarchie, la mise sous tutelle, la vassalisation de l’Europe par les USA n’est pas une bonne nouvelle. Certes ils ne seront pas conduits à mendier leurs diners. Mais il en résultera un déclassement en termes de richesse mais aussi, et surtout en termes de puissance, qui devrait les conduire à la redouter. Pourtant, tout l’establishment Européen soutien une attitude très agressive vis à vis de la Russie. Songeons que pour les industriels allemands, le sabotage de NorthStream signifie le choix entre la ruine, ou la reddition aux intérêts américains. Pourtant, il n’y a pas eu un murmure outre Rhin pour s’insurger, même quand Seymour Hersh a confirmé que l’action venait bien des USA.

Vraisemblablement, l’impotence politique de l’Europe, son impuissance même, plonge ses racines dans le projet idiot de réunir dans une seul état des populations ne partageant ni les mêmes valeurs, ni la même vision de l’histoire. L’Europe est un continent, une construction géographique. Dans cette vision, sa frontière terrestre est sur l’Oural. Mais à partir du moment où l’on décide d’en donner une définition politique, se pose alors la question des frontières au sens géopolitique. Tant qu’existait l’URSS, les choses étaient claires, la frontière était celle où se rencontraient les pays sous influence américaine, et ceux sous influence soviétique. De manière trivial, l’identité trans-européenne se définissait par rapport à un ennemi. Quand l’ennemi a disparu, la question d’une véritable identité, endogène, s’est posée. Ainsi, la frontière se déplaçait vers l’Est, agrégeant des pays de plus en plus nombreux, ne partageant ni la même vision de l’histoire, ni les mêmes intérêts, ni les mêmes valeurs. Pourtant, il existe bien une forme d’identité européenne, et celle-ci est culturelle. Car effectivement, on connait intuitivement que Saint-Sens, Chopin ou Tchaikovski sont des compositeurs Européens, Dickens, Zola ou Tolstoï sont des auteurs européens, etc. Bien que le continent a été déchiré par de nombreuses guerres, il a développé une forme de culture commune, qui est définissable au-delà des différences de langues et de coutumes, de formes, etc. Tout aussi intuitivement, un Français se sentira moins dépaysé à Vladivostock qu’à Pékin. En fait, il y a une escroquerie historique considérable à vouloir confondre la frontière de l’Union Européenne à celle de l’Europe en tant qu’objet et processus historique.

Sans valeurs communes, sans vision historique commune, l’Union Européenne adopte la caricature de progressisme que les USA exportent sous le nom de « wokisme », et pour trouver un ersatz d’identité, se reconstruit un ennemi extérieur, recyclant de manière commode celui qui a assuré sa cohésion durant la guerre froide. Ainsi, sa position sur l’Ukraine associe les bonnes vieilles traditions impérialistes, et les nécessités politiques générées par une tentative d’unification an-historique. Elle entre donc dans un processus politique irrationnel parfaitement auto-destructeur. Mais reconnaitre à la Russie et sa part d’identité Européenne, et sa part d’altérité, avec la reconnaissance de ses intérêts particulier dans le destin européen, la conduirait inévitablement à renoncer à la définition d’une identité transnationale européenne. Ainsi, les facteurs objectifs et subjectifs se renforcent les uns les autres pour la conduire au suicide.

L’Europe se trouve donc au centre d’un réseau de tensions difficilement soutenables. La Russie a intérêt à son affaiblissement, et de préférence à la disparition des institutions européennes, qu’elle voit comme un relais de la volonté de Washington. Elle le fait d’une part en la laissant s’épuiser à soutenir l’Ukraine. Car il serait probablement assez facile de couper les lignes d’approvisionnement en armes occidentales, donnant à l’UE une bonne raison de cesser son soutien. Elle le fait aussi en développant des institutions qui, ne serait-ce que sur le plan économique, sont plus attractives que celles de l’UE, et cela, en particulier, usant de l’exemple dissuasif de la saisie de ses actifs en Euros.

Les USA eux, ont intérêts à l’asservissement de l’Europe. Et ils ont entamé celui-ci avec sa mise sous dépendance énergétique, ainsi qu’en attirant sur leur sol les entreprises qui ont besoin d’énergie meilleur marché.

Ainsi, par sa politique absurde et déracinée de toute réalité historique, l’UE se trouve encerclée par son ennemi et son « allié » (qu’il me soit permis de rajouter ici des guillemets). Pourtant, aucun des deux n’a intérêt à sa « mort », à une crise systémique plus sévère encore que celle qu’a connue la Russie en 1991. Quand elle surviendra, elle ne pourra se le reprocher qu’à elle-même.

Conclusion militaire du conflit

Quelle pourrait être la conclusion sur le terrain militaire ? Cela reste encore très difficile à dire. On a prédit une grande offensive Russe qui ne vient toujours pas. L’une des raisons est que pour maintenir l’adhésion populaire russe, il faut éviter une grande bataille coûteuse en vies. On voit bien que l’état-major russe ne se soucie pas d’une victoire qui serait sanglante. Et puis, demeure la question de la réaction occidentale. En cas de défaite spectaculaire, est-on à l’abri d’un emballement vers un conflit généralisé ? L’investissement émotionnel est tel en Europe, que c’est un paramètre à prendre en compte. Pour le moment, on a plutôt l’impression que le choix est d’attendre que l’armée ukrainienne s’effondre faute d’effectif. Il sera alors possible de s’avancer jusqu’aux frontières du Donbass, et de reprendre les négociations. L’Ukraine sortirait du conflit vaincu, mais avec honneur. N’étant pas humiliée, elle pourrait reprendre les négociations la tête haute. Ce serait une conclusion logique. Elle permettrait aux USA de se retirer également sans humiliation, et amortir la défaite auprès de leur opinion publique comme ils ont su le faire depuis le Vietnam. Mais la vraie question est : est-ce que l’Europe, perdue dans son délire idéologique, n’interdirait pas, à nouveau, la négociation. Hélas pour nous, nous sommes sûrement devenus l’acteur le plus imprévisible du conflit. Même l’Ukraine, en dépit des phénomènes de corruptions, a fait preuve de plus de maturité politique. Car, à nouveau, rappelons-le : elle a tenté par deux fois d’entamer des négociations, et c’est l’Europe qui les a sabotées. Si maintenant elle parait tentée par l’idée démente d’amener l’OTAN à se lancer dans une campagne militaire sur son territoire, c’est du fait d’avoir été placée, par cette même OTAN, dans une situation désespérée. 

Il faut aussi mentionner le cas particulier d’Odessa. Dans l’imaginaire russe, elle joue un rôle comparable à celui de Marseille pour les Français. Elle est la source d’une culture et d’un humour particulier. Or, si elle demeure dans un état ukrainien issu du conflit, son identité sera détruite et la population subira la violence des extrémistes, comme cela a déjà été le cas dans le passé. Il y donc deux solutions pour cette ville : soit la conquête, avec toute la violence et les destructions que cela signifie, ou l’attribution d’un statut particulier, garantit par des pays européens et la Russie. Pour que cette solution, qui serait préférable, soit envisageable, il faudrait un minimum de confiance entre les parties. Le sabotage avoué des accords de Minsk par la France et l’Allemagne a fait voler en éclats en Russie l’idée même que l’on peut mener des négociations honnêtes avec les pays occidentaux.

Cette considération ne concerne pas seulement le cas d’Odessa, mais le règlement du conflit en général. Pour la partie russe, les européens ne sont plus des négociateurs sincères, et seront toujours suspects de chercher à gagner du temps pour préparer le prochain acte hostile. Cela a deux conséquences particulièrement graves :

D’abord la Russie voudra être sûre que l’outil militaire ukrainien est définitivement détruit, ce qui veut aussi dire, que l’Europe et les USA n’auront plus les moyens de le reconstruire. La destruction des moyens militaires, et l’épuisement des ressources occidentales, impliquent un coût humain terrible. Par la trahison de la parole donnée, la France et l’Allemagne en porte une part importante de responsabilité.

La diplomatie des deux principales puissances européennes étant décrédibilisée, il faudra un garant non européen à tout accord de cessez le feu ou de paix. C’est là un point parfaitement choquant si l’on y songe bien : peu importe la ligne de cessez-le-feu, la nouvelle frontière, l’accord et la nouvelle géographie européenne sera garantie par, la Chine, l’Inde, la Turquie peut-être. La France et l’Allemagne seront peut-être invitées à prendre place sur un strapontin pour parapher l’accord loin en dessous de la signature de Xi Jinping par exemple, mais ce sera pour le show. La réalité est que l’Europe sera exclue de la résolution d’un conflit ayant lieu sur son territoire, pour la première fois de son histoire!

Si j’insiste tant sur la dimension diplomatique, c’est que, dans nos analyses du conflit qui commence le 24 février 2022, nous sommes gênés par les habitudes de pensées issues de la mère de toute les guerres : celle de 1940. Alors, la dimension militaire était prépondérante, et l’ampleur des combats, des pertes, des souffrances, agissent encore sur notre idée de ce qu’est la guerre. L’épisode de la guerre de cent ans que nous observons aujourd’hui, et qui, de mon point de vue, doit la clore, diffère profondément en ce que les aspects diplomatiques et économiques surclassent largement les aspects militaires. Dans la manière dont la Russie utilise un théâtre d’opération limité dans son extension géographique et dans les moyens militaires engagés, afin de provoquer un bouleversement de l’ordre mondial, on est tenté de voir une extension de l’art opératif à la diplomatie, politique et économique.

Et justement, d’ici environ un mois, se tiendra le SPIEF (Forum économique de Saint-Pétersbourg). Il rassemblera d’éminentes personnalités du monde entier venant participer à ce qui est devenu un événement majeur pour ce qui concerne l’économie de l’Eurasie, avec tout ce que cela peut représenter de stratégique. D’Inde, de Chine, d’Afrique, du Moyen-Orient, d’Amérique Latine, on viendra confortablement et rapidement à bord de vols directs. En revanche, pour les européens qui voudraient participer, il faudra soit prendre un bien pour la Turquie ou pour l’Arménie, ou la Géorgie, puis un second vol pour Moscou ou Saint-Pétersbourg, avec plusieurs heures d’attente entre les deux, le prix étant environ quatre fois plus cher. Ou alors, on pourra aussi transiter par Helsinki, puis passer la nuit dans un car pour se rendre à Saint-Pétersbourg. Et ces contraintes, nous nous les sommes infligées volontairement! Ainsi, peu d’Européens feront le voyage, d’autant plus qu’ils en seront souvent découragés par leur pairs. Dans la ville que Pierre le Grand a bâti, ironie de l’Histoire, pour se rapprocher de l’Europe, si proche de nous mais désormais si éloignée du fait de notre stupidité, le monde se rassemblera, et en notre absence, se prendront des décisions importantes, engageant notre avenir avec celui du monde, vraisemblablement de nouvelles demandes d’adhésions au BRICS, par exemple. Peut-on trouver une plus belle et symbolique illustration de la splendide médiocrité intellectuelle des élites européennes, que cette exclusion volontaire des nouveaux mécanismes et organisations autour duquel le monde évolue ? Elle rappelle cruellement celle qui caractérisait les élites de l’URSS finissante. A ceux que le parallèle choquerait, je conseille de trouver une photo du Brejnev gâteux et tardif, à la tribune de la place rouge, et, d’un coup de photoshop, de remplacer son visage par celui de Joe Biden avec ses lunettes de soleil. Divertissant et convaincant, n’est-ce pas ?

En guise de conclusion provisoire : les cicatrices de l’histoire

On sait bien que la géopolitique s’embarrasse peu de morale. Mais il est difficile de conclure sans parler des souffrances, ou pour dire les choses dans leur simplicité crue, du mal que nous avons répandu.

Il y a d’abord les centaines de milliers de morts qui formeront, selon toute vraisemblance, le bilan final de la guerre fratricide que nous avons provoquée, et prolongée (voir les déclarations de Naftali Benett). Tout en reconnaissant que c’est l’Ukraine qui paye le prix le plus fort, qu’il me soit permis toutefois de les invoquer ensemble, Ukrainiens et Russes. Car, je ne sache pas, que les larmes d’une mère pleurant sur la tombe de son enfant se soucient de la couleur de son passeport. Elles sont toutes aussi brûlantes, et aussi longues à sécher. Mais cela, sans en nier la cruelle importance, c’est la partie immergée de l’iceberg.

Car, afin de mettre en oeuvre le délire eschatologique de Zbigniew Brzezinski (j’emprunte l’expression à la brillante recension de son livre faîte par Olivier Berruyer sur son blog « Les Crises »), les USA, puis le reste de l’Occident, se sont lancés dans un remarquable programme d’ingénierie sociale pour séparer l’Ukraine et la Russie. Grâce aux déclarations de Viktoria Nuland, nous savons même combien cela a coûté ! Mais personne, parmi les élites occidentales ne s’est posé la question de la dangerosité de la matière historique qu’ils trituraient ainsi. Car de l’Histoire, leur ignorance crasse leur à fait perdre tout sens.

Quand l’URSS s’est dissoute, elle a séparé des peuples, Russe, Biélorusse et Ukrainien qui avaient des siècles d’histoire commune. Il leur fallait reconstruire, ou inventer une nouvelle identité nationale. C’est pour l’Ukraine que l’équation était la plus difficile. Ses frontières, héritées de l’Union, étaient en partie artificielles, on le répète souvent. Et alors ? Aurait-elle été le seul état, né des turbulences de l’histoire, et dont les limites sont tracées un jour sur une carte par le « fait du prince » ? Oui, il est plus difficile de faire vivre ensemble une population multi-ethnique, multi-linguistique et pluri-religieuse que si elle est homogène. Il aurait fallu aider ce jeune état à surmonter ses divisions. Nous avons, nous les champions auto-proclamés de la diversité, ressuscité les haines recuites, fouillé du couteau les blessures de l’histoire. Sans surprise, l’état a éclaté.

Ainsi, ses trois peuples devaient, en quelque sorte, se « réinventer ». Ils s’en furent donc à la recherche d’une continuité historique qui, jetant des passerelles sur les violentes ruptures de leur vingtième siècle, leur rende le sens d’un destin commun. Pour l’Ukraine et la Russie, cela ne pouvait être fait qu’ensemble étant donné leurs liens séculaires. Accomplir cette démarche dans le respect des souverainetés nouvelles n’était pas si difficile, et sans nos interventions, on peut estimer que c’est cela qui se serait passé. Mais comme il nous fallait créer de l’antagonisme, nous sommes allés chercher la charogne la plus malodorante au fond des fameuses poubelles de l’Histoire. Nous avons instrumentalisé une minorité ultra-nationaliste qui s’identifiait et partageait les idées de anciens collaborateurs des nazis, ceux que l’on nomme les Bandéristes.

Or, dans cette recherche de ce qui pourrait rendre du sens et de l’unité pour vivre ensemble, le souvenir de la guerre, de l’immense sacrifice et de la victoire de mai 1945, a rapidement joué un rôle central. Et c’est normal. Quand deux Russes, ou deux Ukrainiens, se rencontrent, il se peut que le grand-père de l’un, pourquoi pas tchekiste, ait, un jour, arrêté le grand-père de l’autre. Peut-être ! Mais il est, en revanche, presque certain, que l’essentiel des membres de leur deux familles ont, soit combattu coudes à coudes les Allemands, soit que quelques-uns soient morts de fait de leurs exactions.

Ainsi, en jouant de ces anciens antagonismes entre ceux qui avaient collaboré, et ceux qui se sont battus contre les nazis, nous avons touché à quelque chose de très profond, le coeur même d’une identité retrouvée. La révolte qui a enflammé, en 2014, le sud-est de l’Ukraine était donc spontanée. Il était impossible pour des populations qui s’identifiaient à la lutte contre le nazisme, de vivre sous un pouvoir qui faisait de Stepan Bandera un héros.

Les guerres se finissent, et les chagrins s’éteignent quand leur propre mort délivre les mères de leur deuil. Les blessures de l’Histoire guérissent bien plus lentement. Elle s’enfonce dans le passé, pour agir comme les plaques tectoniques qui, sous nos pieds, accumulent les tensions qui finissent par se libérer. Elles ressurgissent dans les éruptions de violence qui sont souvent d’autant plus forte qu’elles se sont nourries de temps de sommeil. C’est avec ce genre de forces que nous avons joué, et continuons, aveugles et sourds aux souffrances que nous générons, à le faire. Pourront-ils nous pardonner cette félonie ?

Mais nous oublions que les mêmes tensions traversent toute l’Europe. Car nous partageons ce passé. La frontière que nous voulons tracer à l’Est de l’Union Européenne, n’a aucun sens culturel, et se joue encore plus de l’Histoire. Nos lignées ancestrales de Nazis, de Fascistes, de collaborateurs, de Franquistes, nous observent avec satisfaction. Pendant que nous chantons, sur tous les modes connus et inconnus, la diversité, tout cet héritage remonte et s’infiltre entre les failles que nous avons ouvertes en Ukraine. Je suis un peu hésitant devant le concept de justice immanente, et assez peu porté à la prophétie, mais il m’étonnerait fort que nous ne finissions pas par payer au prix fort cette trahison de toutes nos valeurs. Peut-être même payerons nous plus cher que l’Ukraine.

Pour finir, puisqu’il est aujourd’hui public que nous avons, non seulement voulu et préparé cette guerre, mais que nous l’avons aussi prolongée en sabotant les négociations, il serait temps enfin de nous poser la suivante : le jour où une mère ukrainienne viendra nous demander des comptes pour son fils mort en défendant sa patrie, ainsi que pour le fils de sa soeur, Russe, mort de l’autre côté de la ligne de front, quelle sera notre réponse ?

Daniel Arnaud

58 Commentaires

  1. C’est certainement idiot, mais la crédibilité du texte et de son auteur sont dépendantes de la crédibilité orthographique et syntaxique dudit auteur. C’est donc dommage.

    • Je me permet d’être d’un avis contraire.
      L’orthographe est un instrument d’exclusions sociale pour limiter les intervennants autorisés et ne tolérer que les plus conformistes.
      J’ai aussi noté des erreurs, (J’en commet aussi) mais je vais m’en tenir à une série d’objection sur le fond.

      • Je suis d’accord avec vous.

        D’autant plus que si vous avez l’habitude de consulter des archives cette phrase « la crédibilité du texte et de son auteur sont dépendantes de la crédibilité orthographique et syntaxique dudit auteur. » est un total non sens.

        Maintenant ne soyons pas idiots, pour faciliter le travail de la paresse intellectuelle, la science des ânes a besoin d’une fonction « Copier/Coller », qui ne l’oblige pas à reprendre les écarts d’orthographe et de grammaire. Vous l’aurez bien compris 😉

  2. Monsieur,
    je vais m’autoriser une poignée d’objections sur votre analyse. N’y voyez que des détails l’essentiel me parait bien exprimé.
    Je ferais remonter l’antagonisme à 1905: L’occident n’ayant pas pardonné à la Russie de perdre contre une puissance jaune. Je sais c’est raciste, mais je soupsonne nos élites de l’être.
    Dans l’alignement européen, je penses que vous sous évaluez l’impact des écoutes US.
    Dans toute société moraliste (Et nous le sommes) les turpitudes permettent le chantage. La NSA n’y contribuerait pas? Nous sous évaluons cet aspect qui a mon avis explique le suicide de nombre d’élite européennes ayant bien trop a cacher.

    Comme vous le voyez des thémes secondaires mais important pour ceux qui veulent secouer la supériorité US en Europe.
    Car je partage votre opinion, nous allons le payer cher, mais nous continuerons (Si j’ai raison).
    Encore merci de ces excellents articles.

  3. Puisqu’il s’agit d’une guerre de cent ans j’aimerais y associer son originale : celle qui opposa la France et l’Angleterre et qui s’est terminée à Waterloo selon De Gaulle.
    Des la rupture du Traité d’Amiens par les anglais la France a dû reprendre ses guerres seculaires contre albion. Des le debut les armées de l’Empire ont affronté les armées coalisées financées par l’or de l’Angleterre jusqu’au Traité de Tilsitt qui aurait permis d’etablir une paix durable en Europe…..si le tsar n’avait pas renié sa signature alors même que le blocus continental avait pour seul but de detruire l’Angleterre puisqu’une invasion n’etait plus possible depuis Trafalgar.
    La Russie doit regretter amerement le manque de perspective d’un homme qui n’aurait jamais dû être tsar puisque son hostilité contre Napoleon a permis l’emergence de celle qui est aujourd’hui son plus mortel ennemi !

    • Vision franco-française de l’Histoire. Relisez Caulaincourt, pourtant un des plus proches de l’empereur et fidèle parmis les fidèles : son constat est sans appel, c’est la France qui a violé sa parole et par ses provocations a fini par faire craquer le Tsar. Quand Caulaincourt rappelait ça à Napoléon celui ci se permettait de ricaner comme quoi ça n’avait pas d’importance.
      A noter que quand Caulaincourt lui promettait aussi une amère désillusion en entrant en Russie du fait de la profondeur du pays , des conditions météo et surtout de l’opiniatreté fanatique des Russes une fois qu’on aurait violé leur sol, il se contentait de le traiter de vieille femme en rigolant…. Hubris…

  4. Une analyse très convaincante : la Russie apparait comme le fer de lance d’un retour au droit des peuples , sinon à disposer d’eux mêmes ,du moins à être considérés comme égaux en droits dans leur culture , leur diversité et leur sécurité.
    l’opération spéciale russe proclame ce droit et son intervention provoquée par les agressions antirusses des néonazis ukrainiens devrait être applaudie par les défenseurs proclamés du droit d’ingérence humanitaire qui se révèlent n’être que des faux alibis au service d’ intérêts particuliers et partiaux.
    Hélas nous sommes du très mauvais côté comme en quarante!
    Quelles que soient les petites négligences d’orthographe n on n’en est paas géné tant le texte est précis , argumenté et pertinent.
    Un vrai plaisir de lecture..

    •  »La Russie apparait comme le fer de lance d’un retour au droit des peuples , sinon à disposer d’eux mêmes  »

      Êtes vous saine d’esprit ?

  5. Je partage l’analyse, mais il ne s’agit pas d’une guerre de 100 ans mais de 1 000 ans (mille)
    Quelques explications historiques très succinctes : le christianisme (à son origine voit apparaitre une multitude de sectes chrétiennes concurrentes) se répand dans l’empire, au 4°siècle l’empereur Constantin (qui se fait baptiser avant sa mort) fonde une nouvelle capitale à Byzance qui sera Constantinople une sorte de retour aux sources (le christianisme est une religion orientale)
    Le conflit est permanent entre le Pape à Rome et l’évêque Basileus de Constantinople chacun excommuniant l’autre… le fossé se creuse entre les chrétiens de Rome et les orthodoxes de Byzance ; des peuples descendant du nord de l’Europe (Varegues) par la Volga et le Dniepr vont jusqu’à Byzance où ils adoptent la religion orthodoxe et vont créer leur capitale à Kiev …en 476 l’empire d’occident s’effondre ; reste la papauté mais chancelante, qui se maintiendra malgré tout et se rétablira grâce à Charlemagne (intérêts réciproques)
    Autour de l’an mille la papauté engage les croisades dont le but officiel est de libérer le tombeau du Christ et en buts inavoués de contrer l’empire byzantin florissant, d’ailleurs la 2° croisade s’est arrêtée en cours de route et a pillé Constantinople ! les Templiers ont occupé le terrain et sont devenu des concurrents des Byzantins
    En 1204 c’est le schisme entre byzantins et chrétiens romains, c’est une guerre déclarée ; les Chevaliers Teutoniques (qui contrairement aux Templiers ne sont jamais allés en Palestine) s’étendent vers l’est sur les terres orthodoxes pour attaquer les princes de Moscovie ; ils seront stoppés et battus en 1242 par Alexandre Nevski (dans l’actuelle Estonie)
    Dans les siècles suivants les catholiques polonais et lituaniens forment un royaume et attaquent les russes orthodoxes ils seront battus…etc je n’écris pas la suite chacun la connait.
    Depuis plus de 1 000 ans la Russie orthodoxe est attaquée.
    Merci à vous

    • Le schisme c’est 1054 pas 1204
      La Byzance des croisades était au bord de l’effondrement, d’où la nécessité des croisades
      Le détournement de la 4e croisade est un enchaînement de circonstances initié par Venise et continué par des querelles dynastiques byzantines, pas un projet politique conduit par Rome

      A partir de 1240, et pour 3 siècles, les royaumes « russes » seront sous la main ferme des mongols

      Etc etc

    • Cher Janus, vous avez raison, l’antagonisme entre la Russie et l’Occident est plus ancien que l’horizon temporel que j’envisage. Mais je me suis expliqué de cela en réponse à d’autres commentaires allant dans le même sens. J’ai choisi de me concentrer sur la période où cet antagonisme revêt les aspects de l’impérialisme des puissances industrielles. Et même dans ce cadre, la date de la révolution russe est un peu arbitraire. On pourrait ainsi remonter au milieu de 19° siècle. L’histoire étant une continuité mais on ne peut pas toujours la traiter dans sa globalité. Sinon, on ne peut plus écrire d’articles, mais seulement des livres :-). Ce qui conduit à rappeler celui de Guy Mettan Russie-Occident, une guerre de 1000 ans.
      Toutefois, je voulais me concentrer sur le passé agissant le plus sur l’actualité. Le conflit avec la Russie qui commence il y a 1000 ans est fortement teinté de raisons religieuses, sous-tendant aussi des manoeuvres politiques (voir justement l’ouvrage de Guy Mettan qui expose parfaitement l’articulation des raisons politiques et spirituels qui mènent au schisme. Cependant, avec la sécularisation de l’Europe, l’importance des questions religieuses s’estompent, au profit de celle des aspects de dominance économique. Le conflit change donc de nature me semble-t-il. Cela dit, il est clair que la flambée de russophobie qui permet de donner des événements une vision biaisée sans rencontrer grande résistance repose sur de préjugés profonds qui prennent leur racines dans l’hostilité classique qui nait au moment du schisme. Ceci tendrait à vous donner raison, mais si j’avais voulu traiter le sujet depuis son origine millénaire, il m’aurait fallu un livre entier… celui de Guy Mettan 🙂

      • Merci pour votre réponse, mon propos n’avait d' »autre but que d’élargir la perspective…sans prétention d’écrire un article encore moins un livre.!!!
        il n’en demeure pas moins que les ressorts puissant de l’Histoire sont toujours à l’oeuvre.

  6. « Je me permet (🙄) d’être d’un avis contraire.
    L’orthographe est un instrument d’exclusions (🙄) sociale pour limiter les interven(🙄)nants autorisés et ne tolérer que les plus conformistes.
    J’ai aussi noté des erreurs, (J’en commet(🙄) aussi) mais je vais m’en tenir à une série d’objection(🙄) sur le fond. »
    J’opine que Monsieur Rémi se situe dans la provocation cacographique… :-))

  7. Caulaincourt est Caulaincourt….je ne conteste pas que Napoleon ait fait de nombreuses erreurs mais le blocus etait dirigé contre l’Angleterre pas la Russie; par ailleurs d’autres sources rapportent que le tsar a surtout cédé à ses boyards à qui le blocus faisait perdre de l’argent.
    Un dirigeant capable d’une vision politique ne cede pas à des influences particulieres mais seulement à l’interêt superieur de son pays alors que la France etait le seul barrage à l’expansion sans limite des Pitt et des autres….
    Alexandre I° n’a jamais caché qu’il faisait la guerre à Napoleon pour assouvir une rancune particuliere, etrange conception des devoirs d’un chef d’Etat.

    Heureusement pour les russes Poutine n’est pas Alexandre.

    • Visiblement, les Russes étaient très colère de nos manigances polonaises. Et ils supportaient mal d’être traités en inférieur plus d’autres choses dont hélas je ne me souviens plus.
      C’est agréable de papoter avec vous cher Michel.

  8. Le passage sur l’Europe et son avenir est bien le meilleur de ce texte.
    Les incitations fiscales américaines à la relocalisation des grandes entreprises européennes est un sujet à peine évoqué dans les médias. Cela va de pair avec la chasse à la fraude fiscale et la mise en tutelle des anciens tax heavens européens au profit itou d’une éventuelle relocalisation des capitaux outre atlantique .
    Dire que tout l’establishment européen est vent debout contre la Russie est je pense inexact , seulement la voix des « pro-russes » ou plutôt  » pro-coopération avec la Russie  » ce qui est différent, a été étouffée par une campagne politico-médiatique dont l’Occident a le secret depuis l’affaire Yougoslave des années 90 .
    Ceux qui poussent le plus sont je pense les fédéralistes pur jus, qui voient dans l’affaire Ukrainienne l’occasion rêvée de resserrer les rangs et faire avancer leur agenda , il suffit de voir le rôle assumé par Ursula Von der Leyen qui se balade en Chine avec Macron, tient salon avec Joe Biden, et s’affiche au G7 avec son collègue Charles Michel supposé représenter l’exécutif européen. Il y a une « dictature » qui s’installe en Europe, bien sûr non pas une dictature qui interdira la liberté d’expression , les droits de l’individu ou le droit à manifester , bien au contraire ces droits ont largement prouvé depuis 20 ans qu’ils ne posaient aucun danger à l’oligarchie , mais un ensemble de règles et de législations qui interdiront toute contestation réelle du pouvoir « fédéral »
    Comment ces fédéralistes aborderont la question de la tutelle américaine si jamais ils veulent l’aborder , eux seuls le savent

    • @Paulo
      Vous avez raison de préciser qu’il existe (heureusement) en France et ailleurs en Europe, une élite non russophobe. En essayant de ne pas être trop long (il me semble avoir déjà pas mal exigé des lecteurs), on est conduit à des simplifications. Le problème est que, comme vous le mentionnez vous même, les opinions alternatives ont beaucoup de mal à se faire entendre. Et je pense même que beaucoup se taisent par crainte de l’ostracisation.
      Cela dit, la parole qu’un pays projette vers l’extérieure, donc celle que les populations entendent, provient essentiellement de la presse et de la diplomatie. L’homme de la rue Russe accède peu aux débats qui nous agitent. Il aura surtout accès à la presse mainstream, via un traducteur automatique, ou aux messages du monde politique via ce qu’en rapportent les médias russes. Ainsi, le message que la France « exporte » en ce moment est catastrophique. Hélas!

      • « L’homme de la rue Russe accède peu aux débats qui nous agitent. Il aura surtout accès à la presse mainstream, via un traducteur automatique, ou aux messages du monde politique via ce qu’en rapportent les médias russes. »

        C’est hélas réciproque … la préoccupation de l’homme de la rue en France n’est pas la guerre en Ukraine, … Ce qui laisse toute latitude à Zélinsky et son cirque pour faire sa propagande.

  9. D’après X. Moreau, Zelensky aurait séquestré et fait assassiner Zaloujny

    Ça ne va pas bcp mieux pour ch’ti pépère
    MDR

  10. Napoleon a été victime du syndrome bien connu des « chevilles qui enflent ». Le malheur pour l’Europe c’est qu’il s’agissait d’une tres rare occasion d’etablir une paix durable sur le continent en le partageant entre deux empires d’egale dimension politique/economique; celà necessitait d’accepter des compromis eu egard aux avantages du Traité pour le tsar. Encore fallait-il accepter d’avaler quelques couleuvres, comme le fait Poutine aujourd’hui.
    Je crois que schisme venait effectivement des personnaités respectives des deux hommes forts de l’epoque et de leur parcours, l’un revolutionnaire « botté » et l’autre caractere faible et influençable apres l’assassinat de son pere sous ses yeux.
    Il y a quelque chose de shakespearien dans la victoire russe qui a emmené l’aristocratie russe à Paris d’où elle a ramené les idées nouvelles qui ont conduit à la premiere revolution des « decembristes »….
    Voir Pierre dans Guerre et Paix…

    • Faible et influençable?Alexandre? Vu comme il a mené sa guerre contre nous, c’est un faible et influençable à la Charles VII. 🙂
      Ce ne sera ni le premier ni le dernier à s’être fait b… par les Anglais. Les Espagnols en ont encore du mal à s’assoir deux siècles après.

  11. C’est un leurre cette offensive des ukro-nazis en Russie.
    Ils souhaitent dégarnir des russes le périmètre de Mariopol,pour foncer sur la mer d’Azov..

    • Allons Monsieur, quelle offensive? On parle de 2 ou 3 chars et quelques blindés d’infanterie. Pas de quoi militairement fouetter un chat. Les Ukros savent bien que ce n’est pas avec ça qu’ils vont changer le dispositif russe. Surtout les trois lignes de défense sud. Plutôt une manière de provoquer Poutine en le faisant passer pour un con. Je ne crois pas qu’il tombe dans le panneau mais ça doit bien l’agacer. C’est pas idiot comme méthode. C’est très British.

      • Mais Poutine a déjà démontré au moins cinq fois en un an et demi qu’il s’en tapait de l’ego et de passer pour un con.

        • Normal … surtout quand un con est capable de vous faire un passing-shoot … parce que vous avez foncé bêtement tête baissée au filet. 🙂

          Rappelez-vous Borg vs Mac Enro … 🙂

      • Penses tu ! Tout va bien !
        Les russes ont déployé un système TOS-1A dans la région de Belgorod et les frappes sont menées vers Shebekino (explosifs thermobariques sur leur propre population donc)

        A part ça, les membres de la Légion russe libre ont tellement tous été tués lors de la dernière incursion en Russie qu’ils ont recommencé

        Tout-va-bien

  12. Quelle propagande grotesque 😂
    Une piste s’impose lorsque l’on constate les fautes de syntaxe, ce texte a probablement été écrit en russe puis traduit automatiquement. Ce qui expliquerait les incohérences syntaxiques ( écrire « pour qu’un accord est des chances » ou écrire saint-sens à la place de Saint-Saëns relève certainement plus d’un problème technique de traduction que d’une maladresse grammaticale.
    Ce Daniel Arnaud n’existe probablement pas ou il n’a fait que relayer un texte rédigé par autrui mais sa pensée continue d’être encensée ici. Ce qui en dit long sur le degré d’analyse et de clairvoyance des adorateurs de Poutine. Et sur leur indépendance…

    • Vous racontez n’importe quoi , une faute de syntaxe et voilà le complot russe révélé..
      Daniel Arnaud existe bien et vous pouvez l’écouter et le voir sur les premières vidéos mises en ligne par de Castelnau
      « Adorateurs de Poutine », ça pue la propagande otanienne primaire qui personnalise à outrance , c’est mieux pour impressionner les masses , ce qui en dit long sur vos motivations à poster ici .

      • Cher Paulo, laissez tomber ce troll de merde de la pire espèce et consolez vous en disant que sa bande n’arrive à trouver que des résidus dans son genre pour aller faire le hooligan chez les autres. Il ne doit pas coûter bien cher vu le niveau.

        • « … Il ne doit pas coûter bien cher vu le niveau. … »

          @darras
          Je me suis aussi fait cette réflexion. Le retour sur investissement ne doit pas être vraiment terrible.

          Si j’étais son Boss, je l’aurais viré depuis longtemps. Mais que voulez-vous la meute est tellement massive qu’il y a forcément du gâchis …

          Enfin ils sont bien mignon … si on ne les avait pas on ne pourrait plus se marrer 🙂

          • Mouais… Mais bon, même sous le pied gauche…ça colle et sa pue… 🙂

  13. J’allais écrire que cela faisait longtemps que je n’avais pas lu un tel tissu d’inepties mais ce serait injuste : on lit malheureusement tous les jours des sottises pires encore. Et tout n’est pas faux, loin de là, dans cette analyse. En revanche tout y est biaisé et perverti par l’adoption d’un point de vue aberrant sur les événements du XXe siècle. Un exemple : présenter la Russie tsariste du début du XXe siècle comme un pays en proie à une tentative de colonisation de la part d’un Occident dont la notion n’existe même pas à l’époque est une énorme bévue. C’est tellement gros que je ne crois pas l’avoir déjà trouvée sous la plume de quiconque. Pour rappel : au XIXe siècle, la Russie a conquis et COLONISÉ toute l’Asie centrale, tout le Caucase et une bonne partie de l’Extrême-Orient après avoir chassé les Tatars des steppes du sud de l’Ukraine au siècle précédent. À cette époque, la Russie constitue certes un cas un peu particulier dans le camp des puissances coloniales européennes mais elle lui appartient néanmoins. Autre exemple d’énormité : écrire que les accroissements territoriaux de l’URSS en 1945 ont été modestes au regard des sacrifices consentis, cela relève du pire aveuglement. Qu’aurait-il fallu ? Que toute l’Europe passe sous contrôle soviétique au lieu que l’on se contente de l’Allemagne de l’Est, de la Pologne, de la Tchécoslovaquie, de la Hongrie, de la Roumanie, de la Bulgarie et de la Yougoslavie ? Sans parler du cas finlandais. Comment peut-on écrire de telles âneries ?
    M. de Castelnau, je pense sincèrement que la publication sur votre site d’interventions d’une telle faiblesse intellectuelle dessert beaucoup la cause, tout à fait noble à mon sens, que vous voulez défendre.

    • Cher Heliodore,

      Vous vous permettez de qualifier mes propos de « inepties » ou « sottises ». Je me demande bien ce que vous donne le droit d’ère insultant. Probablement un forme de supériorité intellectuelle qui doit éblouir le lecteur de vos commentaires ? Je vais pourtant m’attacher à vous répondre en restant dans les limites de la bienséances. Vos remarques
      L’occident à parfaitement la conscience de lui même, c’est lui qui qualifie l’orient de barbare et sauvage, c’est lui qui se donne la mission de civiliser le monde, etc. Lisez Guy Mettan, par exemple. Lisez les nombreux textes des universitaires, politiques ou journalistes qui promeuvent ou justifient la colonisation.
      Le fait que la Russie soit impérialiste, et en même temps subisse un impérialisme plus fort que le sien n’est surprenant que si on ignore les notions d’impérialisme forts et impérialisme faibles. En effet la Russie s’étend vers le sud, mais en même temps, son début d’industrialisation est complètement financé par les puissances européennes, la France en tête d’ailleurs, avec, entre autre, le fameux emprunt russe. Donc oui, l’exportation de capitaux est une des manifestations majeurs de l’impérialisme, un mode de colonisation particulièrement efficace. Nous devrions en être conscient, en tant que Français, puisque c’est bien par la finance et la culture que les USA nous ont colonisé, n’est-pas ?
      Enfin, concernant le partage du monde en 1945 : avec quelques centaines de milliers de morts, les USA se sont constitués un empire mondial. Ils sont désormais partout, sur tous les continents. L’URSS reçoit les pays que vous citez, qui sont d’ailleurs à ce moment des champs de ruines, pour l’essentiel. Il s’agit d’une bande tampon, pour se protéger d’une agression à venir, et c’est ce que Staline avait demandé comme but de guerre. L’URSS l’a payé de 25 millions de morts. Donc si vous faites la comparaison entre la part qui échoit aux USA, et celle qui échoit à l’URSS, en la comparant au prix du sang payé, effectivement, les gains de l’URSS sont modestes. Je dois d’ailleurs dire que c’est Emmanuel Todd qui a remarqué cette dissymétrie, et que je ne fais là que reprendre son analyse à mon compte.
      Maintenant, mes propos ne sont sûrement pas au dessus de la critique. Mais puis-je vous recommander, avant de réagir, d’approfondir les questions qui vous choquent. Je vois que mon point de vue vous a agacé. Mais si, au lieu de réagir un peu trop vivement, vous aviez approfondi votre réflexion, vos critiques auraient été plus pertinentes. Parce que, quand même, affirmer que la notion d’occident, en tant qu’identité d’une partie de l’Europe n’existe pas au début du XX° siècle! Allons, allons, ces prémisses se forment à l’époque du schisme entre Rome et Byzance!

      • Monsieur,
        Je vous remercie de votre réponse mais, malheureusement, elle n’est pas de nature à modifier en quoi que ce soit mon jugement. Vous semblez croire qu’il existe en Occident une russophobie traditionnelle. Vous invoquez pour défendre ce point de vue les travaux de Guy Mettan. À quoi je répondrais que l’on pourrait tout aussi bien écrire une histoire de la germanophobie française du Grand Siècle à Maurras ou une histoire de l’antiaméricanisme : Jean-François Revel n’a-t-il pas consacré un livre à ce qu’il appelait L’Obsession anti-américaine ? On pourrait aussi écrire un livre sur la russophilie, de Diderot à Aragon en passant par les ballets russes. Et alors ? Qu’en conclure ? La littérature sur la Russie balance entre Custine et Leroy-Beaulieu. Rien de plus banal. La Russie, de ce point de vue, ne constitue en rien un cas particulier, sauf à montrer une inquiétante poussée de fièvre obsidionale.
        Quant à présenter la Russie du début du XXe siècle comme une victime de l’impérialisme européen, laissez-moi vous dire que c’est une blague : à quel moment les Européens sont-ils en mesure de dicter leur politique aux tsars ? En intégrant les circuits commerciaux internationaux, la Russie s’est simplement retrouvée soumise aux mêmes exigences que tous ses concurrents tout en accédant dans le même temps aux capitaux internationaux. À quel moment ce financement a-t-il entravé le développement russe comme ce fut le cas pour l’économie indienne sous domination britannique ? Jamais. Vous pouvez toujours considérer que l’adoption par les élites russes à partir du XVIIIe siècle du mode de vie européen constitue une forme de colonisation mais vous noterez que c’est le monde entier qui a été peu à peu européanisé et, de ce point de vue, le Japon n’a pas été moins colonisé que la Russie. Au contraire. Parler de colonisation dans ces cas-là, c’est à peu près vider le concept de tout sens. Votre usage extensif du concept de colonisation vous conduit naturellement à évoquer la colonisation de la France et de l’Europe par les États-Unis. Et, là encore, il me semble que vous faites preuve d’un simplisme coupable : vous mettez sur le même plan la vassalisation économique et militaire de l’Europe et l’adoption par elle des standards culturels américains. Or ce sont des processus qui, même s’ils ne sont pas sans lien, demandent à être analysés indépendamment : la culture américaine a commencé de pénétrer progressivement la culture européenne bien avant que les Américains ne s’imposent en Europe. Le rôle économique des Américains est encore à peu près nul dans la France de l’entre-deux-guerres mais le jazz est déjà en passe de remplacer la chanson populaire française dans les goûts de l’élite intellectuelle. Voyez Leyris ou Desnos : ils balancent entre Damia ou Yvonne George et Sidney Bechet.
        Pour ce qui est de votre analyse de l’après-guerre, elle est à la fois fausse et absolument effrayante : vous semblez penser qu’une pauvre Russie innocente a gagné au prix de ses morts le droit d’asservir tous ses voisins. En réalité, l’URSS a joué, dans l’entre-deux-guerres, son jeu sur la scène internationale, et ce, avec un cynisme et une cruauté sans pareils – sur la question, je peux vous renvoyer au témoignage d’un Jan Valtin ou aux analyses d’un Stephen Koch. L’URSS a payé au prix fort les erreurs et la terrible paranoïa de Staline mais son isolement – tout relatif puisque les Français ont longtemps tenté de négocier une alliance de revers avec les Russes – ne doit rien à une hypothétique russophobie et tout aux choix désastreux de Staline. Si les Américains ont en grande partie réussi là où les Russes ont échoué, c’est simplement parce qu’ils proposaient un modèle à la fois plus efficace et plus attrayant. Il y a toujours eu beaucoup de gens pour critiquer le capitalisme mais pas grand monde pour refuser le confort qu’il permet : offrez un Frigidaire et le monde est à vous.
        Venons-en maintenant à votre usage du concept d’Occident. On parle d’Occident, au sens contemporain du mot, pour évoquer l’ensemble des pays alliés ou vassaux des États-Unis : l’Europe, le Canada, l’Australie, la Nouvelle-Zélande et le Japon. Dans ce sens, qui est celui qui prévaut aujourd’hui, l’Occident n’existe donc pas à la fin du XIXe siècle ou au début du XXe siècle. C’est ce que j’ai voulu dire. Je suis bien conscient que la notion est plus ancienne (je pratique Rémi Brague depuis assez longtemps) – et le fait que vous ayez pu en douter montre bien que je ne suis pas le seul à prendre les autres de haut.
        Je ne vous ennuierai pas plus longtemps. Je persiste et signe : je trouve votre analyse à la fois naïve et trop complaisante : en géopolitique, il n’y a pas d’innocents. Une fois de plus, les Russes récoltent ce qu’ils ont planté.

  14. Une these interessante à prendre en consideration qui pourrait expliquer la situation actuelle.
    Whashington livre des armes de second choix, pas seulement pour liquider des stocks ayant atteint la date de peremption, mais aussi pour « titiller » les russes afin de les obliger à reveler leurs armements les plus modernes, piege dans lequel Poutine ne tombe pas et utilise essentiellement des leurres (vieux comme le monde) afin d’epuiser les stocks d’anti-missile otanien; même LCI commence à s’en inquieter….
    Un sujet d’inquietude commence à se faire jour qui ne concerne evidemment pas Londres: l’utilisation de munitions à uranium appauvri commence à polluer le territoire ukrainien de maniere irreversible et ne pourra pas être occulté longtemps comme ça a été le cas en Irak et en Yougoslavie où le nombre de cancers a augmenté y compris chez les soldats du camp du « bien »…

  15. Bonjour. Article remarquable par sa finesse de perception de l’attitude russe et par son intuition de ce que pourrait être la suite de l’histoire.
    J’espère que la Russie a bien compris que l’Occident collectif n’est pas digne de confiance, et qu’elle refusera toute tentative (trompeuse) de paix à ce moment précis de l’histoire; je pense que le peuple russe la refusera avec force, comme il a refusé en bloc la 1ere tentative de négociation menée pour la Russie par Medinski, et que le pouvoir politique le suivra (de peur de perdre son soutien). La seule issue qui reste pour la Russie, et c’est ce que souhaite le peuple – lu et relu ds les réseaux sociaux, c’est une victoire totale sur le terrain, l’arme russe arrivant jusqu’à la Pologne et Odessa, que le pouvoir ukrainien et TOUS les nazis soient anéantis, et disparaissent à jamais du paysage. L’economie et la géopolitique sont plus l’affaire des cercles du pouvoir.
    Merci

  16. . Article remarquable par sa finesse de perception de l’attitude russe et par son intuition de ce que pourrait être la suite de l’histoire.
    J’espère que la Russie a bien compris que l’Occident collectif n’est pas digne de confiance, et qu’elle refusera toute tentative (trompeuse) de paix à ce moment précis de l’histoire; je pense que le peuple russe la refusera avec force, comme il a refusé en bloc la 1ere tentative de négociation menée pour la Russie par Medinski, et que le pouvoir politique le suivra (de peur de perdre son soutien). La seule issue qui reste pour la Russie, et c’est ce que souhaite le peuple – lu et relu ds les réseaux sociaux, c’est une victoire totale sur le terrain, l’arme russe arrivant jusqu’à la Pologne et Odessa, que le pouvoir ukrainien et TOUS les nazis soient anéantis, et disparaissent à jamais du paysage. L’economie et la géopolitique sont plus l’affaire des cercles du pouvoir.
    Merci

  17. Je resterais sur les objectifs supposés, l’Otan, le dollar et l’UE, leur destruction ou leur affaiblissement définitif, l’art opératif consiste à organiser l’action dans le but constant de viser l’objectif, il est donc loin d’être uniquement militaire, les domaines économiques, diplomatiques, voire culturels sont intriqués et interdépendants.
    La préparation économico diplomatique (les Russes avaient leur plan B) pour rendre inopérantes les sanctions occidentales reste à mon sens le point principal de cette guerre, ce sont les sanctions qui devaient tuer la Russie, militairement ce n’était pas possible.
    Maintenant que le 11eme train de sanctions inutiles est passé dans l’indifférence désabusée générale (qui croit encore à leur effet?), et en attendant le suivant, longue litanie témoignage d’une impuissance désespérée, l’Occident n’ayant lui aucun plan B se retrouve à ne pouvoir espérer qu’un miracle, qui comme chacun sait sont rares par essence!
    Surtout quand on en est dépourvu…

    •  » l’Occident n’ayant lui aucun plan B se retrouve à ne pouvoir espérer qu’un miracle, qui comme chacun sait sont rares par essence!
      Surtout quand on en est dépourvu… »
      Salomon il a coupé une femme en dieux comme élément de passage pour sa fatride.
      Pour l’heure probablement que le Roi Salomon avait un poème de coeur.
      Lorsque nous regardons l’histoire de l’histoire de tout les squelettes des milliers d’années
      Cela fait assez ; pas inviter de le voir »
      https://www.youtube.com/watch?v=HsiSmRzSKgQ

    • Alors évidemment; j’ai un avantage dans la prédestination.
      Le catalogue est maqué d’avec les gens qui tournent en rond .
      Pas spécialement d’avec les circoncis vu que s’est des voisins de pallier
      Il reste un problème d’alliance avec le christianisme et puis tout va se résorber et finir en LUI même

      • Et plus tardivement ; on nous expliquera; qu’il y à un décalage horaire d’avec la création.

        • Lorsque je regarde une image , comme celle du topic RDG et un élément de texte « Russie Occident, l’autre guerre de 100 ans (troisième partie) »
          Sémantiquement ; forcément d’emblée nous allons vers l’orthodoxie du regard.
          Que j’avais renvoyé vers les dormants à la première partie du sujet.
          Quand à faire un pont de lecture avec la sourate de la caverne à la vitesse de la lumière avec l’eau de zamzam de Platon
          Ce qui nous renvoi au classique.
          L’essence de la pensé , s’invente toujours un chemin pour mourir.
          La famille; la maison; la filiation et le souvenir de m’a tu vu sont en traine de disparaitre.
          Cerise sur le gâteau.
          A la limite ; bon ben on fait comme ça ; à force d’être à contre courant ; il y a un moment donné ou on rend l’âme.
          Mais mettre un prix sur l’éternité ; pose question !!

          • Et au-delà de ça , voir que le transhumanisme repose d’avec son infrastructure ; ou sa charpente sur le rubicon.
            RS

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