À la manière de beaucoup d’antisémites qui rejoignirent De Gaulle dès 1940, la France est remplie de gens qui répondent à tous les critères du racisme sur le plan du discours individuel mais qui se feraient tuer sur place s’ils étaient confrontés à un régime qui entendait transposer cette attitude au plan des fonctionnements collectifs. Inversement, il existe des gens qui valident sans état d’âme toutes les formes de ségrégations qui résultent du rapport de classe mais qui n’éprouvent pas le besoin d’en délivrer une quelconque traduction rhétorique ou symbolique : pour eux, le « racisé » se perçoit d’abord comme la variable exotique d’un système lucratif.
Toute la perversité du débat politique contemporain, source de bien des malentendus, repose donc sur le fait que des racistes authentiques passent leur temps à délivrer des leçons en racisme à des gens qui ne le sont que par réaction à leur politique. Dans ces conditions, les gogos de la petite bourgeoisie culturelle qui font semblant de croire que la réactivation de la croisade antiraciste constitue l’enjeu spécifique des prochaines échéances électorales sont, au choix, des cyniques ou des imbéciles.
Mais une perversité peut en cacher une autre : c’est la mauvaise foi au carré de tous ceux qui excipent de ce détournement du combat antiraciste pour faire de leur propre racisme une réponse à ce qu’ils appellent le capitalisme et qui, dans leur esprit, se confond circulairement avec la présence des immigrés. Face à la « xénocratie capitaliste », le tribalisme constituerait une forme de retour à la « normale », une ruse de la « nature » pour rentrer dans son lit. Cette position constitue le fond de sauce de toutes les droites « identitaires » ou « illibérales » aux yeux desquelles le « local » et le « civilisationnel », enjambant les dépouilles de l’État-nation, constitueraient les deux champs adéquats à l’action politique.
Comme dans beaucoup d’autres domaines, nous avons affaire à deux contradictions symétriques qui, loin de chercher à se résoudre, tendent à se renforcer chacune dans le miroir de l’autre. Cette mécanique du scandale permet d’occulter la vérité nue, celle d’un racisme qui ne serait pas une faute morale mais la superstructure originelle du capitalisme, la « naturalisation primitive » dont se dissimule le processus d’apartheid qui constitue l’essence même du rapport de classes. Le racisme n’est pas une menace qui advient mais une vérité qui se révèle. C’est ce que l’Occident terminal laisse apercevoir, entre autres déchets, à marée basse d’une civilisation qui se retire.
Le choc qui se joue sous l’écume des rhétoriques électorales est d’une toute autre nature : c’est l’affrontement tellurique entre deux formes de conservatisme qui travaillent les profondeurs de la société française en raison même des contradictions du capitalisme que ne parvient plus à surmonter le compromis de 1945.
Il y a d’abord le conservatisme inconscient qu’on observe dans les grandes masses populaires et qui se traduit, du RN à LFI, par un attachement instinctif aux acquis des Trente Glorieuses. Pour être incapable de penser les conditions dans lesquelles de tels acquis ont pu être arrachés – compromis entre un capitalisme colonial ultra-prédateur et de vieilles structures sociales encore vivaces – ce conservatisme ne se présente plus aujourd’hui que comme une force d’inertie à la dérive, fragmentée en clientèles rivales.
Il y a ensuite le conservatisme conscient des couches supérieures qui savent très bien que la préservation de leurs acquis ne peut se faire que par le passage à une échelle supérieure de prédation, sacrifiant du même coup les derniers éléments de confort qui faisaient accepter aux couches populaires leur infériorisation politique – bagnole pas chère, tourisme de masse, crédit facile.
De Glucksmann à Ciotti, l’enjeu des couches supérieures consiste donc, face à un RN qui cristallise électoralement l’inertie des couches populaires conservatrices, à trouver la meilleure stratégie pour liquider les encombrants vestiges d’un passé qui s’obstine à freiner la voracité du Capital.
Certains restent enfermés dans les catégories imaginaires de ce même passé qu’ils cherchent à révoquer. Ils pensent qu’il va suffire d’agiter les mantras de l’antiracisme moral, et d’en étendre à la gauche les effets paralysants via le chantage à l’antisémitisme, pour maintenir le « cordon sanitaire » qui évite de négocier quoi que ce soit avec les gueux.
D’autres sont plus lucides et savent très bien que les chefs du RN partagent avec eux la même idiosyncrasie sociale. Il s’agit donc de réaliser une prise de judo : là où l’inertie des couches populaires conservatrices pourrait provoquer quelques soubresauts regrettables au moment de larguer les dernières amarres avec la « démocratie nationale représentative », pourquoi ne pas puiser dans cette force ce qui la rend la plus semblable aux affects des dominants – passion de l’ordre et de la sécurité – pour la retourner contre les ultimes lambeaux de l’État social – renvoyés du côté des « Arabes », des « fainéants » et de l’« antisémitisme » ?
Derrière l’ultime tour de piste des castors et de l’antiracisme néocolonial, astre mort hérité de la période mitterrandienne, se joue donc quelque chose de bien plus radical et de proprement fasciste : la fusion entre le racisme structurel des élites et le racisme pulsionnel des « beaufs » excédés.
C’est ce dont Jordan Bardella, ce jeune cadavre de 28 ans, est le nom.
👌
Ce texte est (fort bien)écrit. Pour faire plus simple et plus concret pour ma part je dirais qu’il est singulier de prétendre s’opposer au RN, en lavant plus blanc que blanc, tout en soutenant le régime Banderiste d’Ukraine, lui excusant (ou occultant) toutes ses dérives (racisme et xénophobie, plus qu’une simple posture, validés par des lois, ect…) à propos des vrais valeurs defendables.
Qui se sent morveux se mouche. Le soi-disant nouveau front populaire n’est malheureusement pas à la traîne sur ce sujet.
Bonjour,
Comme pour E Macron, nous ne savons pas qui est J Bardella.
Cdt.
M.C
Très bonne analyse.
Très tôt, dès l’effondrement de l’URSS, Bourdieu avait prévu une régression de 3 siècles du fait de la fin de la terreur communiste dans la ploutocratie occidentale.
Plus besoin de faire des concessions style capitalisme à visage humain ou social démocratie pour tenir les gueux. Mais il y a une suite.
L’histoire ne s’arrête pas là. Exactement comme à Rome, le pouvoir tiraillé entre un imperium à tendance tyrannique dans le sens premier du terme et une oligarchie institutionnelle, voit apparaître la prééminence d’une petite partie de l’oligarchie qui va désormais,comme à partir du IVe siècle, s’affranchir de toute tutelle et s’arroger le régalien pour sa seule voracité. L’état réduit à rien, le citoyen réduit au colonnat, nouveau concept qui va créer le futur serf. Mais ce qu’ont oublié les magnats de l’époque, et ce qu’oublient ceux d’aujourd’hui, c’est que sans état fort et sans citoyen motivé, il n’y a plus personne pour défendre leurs biens et leurs personnes quand les » barbares » attaquent.
Nos états sont faibles, nos armées sont exsangues et les citoyens n’iront pas se battre pour cette bande de dégénérés avides et cretinisés.
Comme l’empire romain d’occident hier, l’empire américain d’Europe est en train de s’effondrer.
Et ceci est essentiellement le résultat de l’incohérence qui opposa Trotsky et Staline.
Pour le second, le marxisme devait évoluer dans le cadre de l’état nation. Pour Trotsky, le préambule inamovible et essentiel de Marx était dans » proletaires de tous pays, unissez vous .. ». Le marxisme ne pouvait pas se réaliser en créant des sortes de collèges nationaux d’opprimés qui arracheraient des parts de profit à leurs capitalistes, sur le dos des opprimés des autres nations.
Staline a gagné. Mais l’incohérence a pourri au point de faire mourir l’expérience et aujourd’hui, rejetons de Trotsky et magnats ultra puissants sont objectivement alliés pour faire péter les derniers vestiges de l’etat-nation pour les uns et du privilège de citoyenneté pour les autres, chacun pariant être finalement vainqueur de la course.
Les carottes sont cuites.
This is the end, my only friend, the end…
Là dedans, Bardella, Zemmour ne sont que des avatars de ceux qui poussèrent Julien l’Apostat au pouvoir et qui rêvaient, à l’aube de la grande glissade, du retour aux grandeurs et vertus passées… sans comprendre l’essence même de la raison de cette décadence.
Au début des années 30, en Allemagne, il y avait un puissant parti communiste, un puissant parti nazi, qui étaient violemment, mimétiquement, antagonistes, et il y avait quelques maigres partis au centre.
Faute de majorité, le Chancelier, issu du Zentrum (Brüning, 2 fois, puis van Papen, puis Schleicher) gouvernait par décrets présidentiels, procédure prévue par la Constitution, mais pour une durée limitée, qui fut vite dépassée.
Van Papen manœuvra pour faire nommer Hitler. Celui-ci, une fois nommé, profita de l’incendie du Reichstag pour saborder la République.
La séquence que nous vivons ressemble, sur un mode certes mineur, à ce qui se passa il y a 90 ans en Allemagne.
Deux blogs extrémistes antagonistes, mimétiquement irréconciliables.
Un centre faible, sans majorité.
Recours au 49.3 pour pouvoir gouverner.
Et prétexte pris du résultat des élections européennes pour dissoudre l’Assemblée, procédure conforme à la lettre de la Constitution, mais bien éloignée de son esprit en la circonstance.
Même absence de limite, même fuite en avant, même certitude d’un juste combat à mener.
Et même oubli de l’intérêt général et du bien commun, noyés dans le tohu-bohu des accusations, anathèmes, batailles d’ego, rivalités mimétiques…
L’avenir est sombre.
Mais où est passée la fraternité ?
Il me semble que les communistes allemands n’avaient fait que 16% et les nazis 33% en 1933: C’est ça l’étau dont vous parlez?
Dans le Reichstag élu en juillet 32, les nazis avaient 230 sièges et les communistes 89, soit un total de 319 sur 608 (cf wikipedia), donc aucune majorité n’était possible en dehors d’eux. Les modérés étaient bien pris en tenaille.
Sans oublier la violence des milices tant communistes que nazies. Emeutes et combats de rue avaient fait, au cours de la campagne électorale, des centaines de morts ! des centaines de morts !
Nous n’en sommes pas là mais le phénomène de tenaille est bien là, s’entretenant de lui-même par la rivalité mimétique entre les extrêmes, d’autant plus que le « modéré » Macron prend comme un malin plaisir à en rajouter dans la rivalité.
Vous devriez sérieusement réviser votre histoire, la période précédent l’arrivée des nazis au pouvoir ( grâce à la droite conservatrice et au centre ) est suffisamment documentée
Que ce soit les années 30 ou l’invasion de la Russie par Napoléon , les analogies historiques douteuses n’apportent rien à la compréhension du contemporain .
Le RN et le Front dit Populaire, vous appelez ça des blocs extrémistes ?
Moi je connais le vrai racisme, il consiste en l’inégalité non ?
L’Afrique aux Africains OK
L’Asie aux Asiatiques OK
La Russie aux Russes OK
La Chine aux Chinois OK
L’Inde aux Indiens OK
Mais la France aux Français ou l’europe aux Européens ce devrait OBLIGATOIREMENT être interprété pour du racisme, de la xénophobie….
… des propos d’un révolutionnaire socialiste allemand protestant voulant créer le nouvel homme socialiste MAIS que nous devrions identifier comme conservateur de droite catholique .
Le chantage habituel des gens qui savent parfaitement ce qu’ils font, et savent méfaire, savent que seul le chantage, la menace et les juges rouges de la 17éme leur permettent de survivre comme les kapos qu’ils sont .
Ha ha ha … …désolé nos fonctionnaires de la Satrapie (je parle de nos zélites et de nos gauchistes) finissent par me faire pisser de rire , ils n’ont plus aucun moyen de m’énerver.
Quand les gars débitent autant de débilités (et d’iniquités) à la minute on finit par en rire, « ils ne tiennent debout que parce que c’est la mode » et qu’ils sont ASSISTÉS par le systéme de la démo-crassie et la raie-publique en permanence.
(ce qui explique pourquoi ils sont si lamentables)
« A force de jongler avec des seaux de merde ils vont finir de s’e’n prendre un sur la gueule »
(j’espère qu’ils n’auront pas le toupet de chialer le moment venu)
Du coup je repars lire l’excellent, l’incontournable, le témoin direct de l’histoire : Roger Holeindre
Au moins avec cet auteur dont je dispose de TOUS les livres, je ne perds JAMAIS mon temps, et je lis autre-chose que de pathétiques falsifications de toutes les réalités.
Dans les années 70 les gauchistes se prenaient pour des africains et militaient pour les intérêts des africains, en 2024 ils se prennent pour des trans, dans dix ans ils se prendront pour des robots mi-homme mi-machine.
Dur dur de tout détruire par orgueil pour prétendre avoir toujours raison, qu’importe les massacres (Mao, Staline, Pol Pot, Kim Jong Un etc…) les dictatures, les dégâts, les falsifications.
Allez je file lire les délires officiels de quelques une des plus grosses loges, communication DE CASTORS « qui ne font pas de politique, qui ne sont qu’un club d’amis ».
J’adore le choix des mots de sophistes machiavéliques, quand les GM ces SECTES auront fini de prendre les gens pour des abrutis peut-être que les conspirationnistes cesseront de délirer sur leurs SECTES étrangères de facto. .
(désolé j’ai des amis FM, intelligents délicieux, pleins de qualités, mais il n’en reste que les mots ont un sens, les loges sont factuellement des sectes…..
Je me demande encore comment un FM peut rester dans sa secte quand je regarde les 50 dernières années de communications publiques officielles de leurs loges, qui vont à l’encontre de ce que les membres pensent ….
Il faut vraiment être enfermé dans une secte pour rester dans ces conditions. )
…Dans ces conditions, les gogos de la petite bourgeoisie culturelle qui font semblant de croire que la réactivation de la croisade antiraciste constitue l’enjeu spécifique des prochaines échéances électorales sont, au choix, des cyniques ou des imbéciles…
Ah ça fait du bien de lire ça, je me sens déjà moins seul
Extrait exemplaire d’ultra-racisme d’un espagnolo-algéro-marocain, né de deux parents Espagnols engagés volontaires fonctionnaires coloniaux en Algérie
(fonctionnaires coloniaux engagés volontaires : c’est important de le préciser, car ce rat fils de rat se permet encore de nous demander de nous repentir. Forcément ça sort tout droit de la secte GODF rien d’étonnant )
Jean-Luc Mélenchon : « Lorsque je suis né 1 Français sur 10 avait un grand-parent étranger, dorénavant c’est 1 sur 4. »
« Par conséquent, ceux qui s’appellent « Français de souche » posent un sérieux problème à la cohésion de la société. »
(Jean Luc Merdenchon : merci pour la vidéo sauvegardée vieux rat)